Extrait du journal de bord
On pourrait croire que le passé est suffisant pour alimenter les caractéristiques de tel ou tel personnage et que finalement il suffirait d'une sorte de "copier coller" pour obtenir l'intériorité nécessaire. Il n'en est rien. Le processus de création n'a pas grand chose à voir avec la remémoration...
On pourrait croire que le passé est suffisant pour alimenter les caractéristiques de tel ou tel personnage et que finalement il suffirait d'une sorte de "copier coller" pour obtenir l'intériorité nécessaire. Il n'en est rien. Le processus de création n'a pas grand chose à voir avec la remémoration...
Parfois un personnage s'impose de lui-même, barrant la route à toute tentative de l'esquiver. Il est là, et il faut faire avec. Sans doute sa venue - ou devrait-on parler de naissance ? - s'est préparée bien en amont et en arrière plan. Cependant le moment de son apparition à la fois fugace et irréversible marque l'auteur de la nécessité d'inclure ce personnage-là et pas un autre. Je ne parle pas de mirage ni même d'hallucination mais d'une rencontre opportune dont je ne saurais d'ailleurs expliquer la genèse.
Dans d'autres cas, la situation d'un récit génère des personnages clones et non clowns - sauf s'il s'agit d'une comédie - parmi lesquels l'auteur fait son choix. En l'occurrence le hasard et la nécessité s'allient pour sélectionner le ou la candidat(e) dont le CV de fiction correspond le mieux... Le casting interne opère alors comme une sorte de bandit manchot qui au lieu d'aligner des pommes ferait coïncider répliques et caractéristiques.
Entre ces extrêmes, personnage qui s'impose et situation qui impose un personnage, il existe une autre catégorie qui emprunte des souvenirs de plusieurs personnes croisées dans la vie réelle. Une alchimie curieuse se met en place pour faire exister cet hybride.
D'une sorte de limon mêlant des strates de passé, l'auteur-archéologue extirpe de sa mémoire des fossiles, et les concasse pour en obtenir une nouvelle matière plus malléable. Le souvenir étant déjà une succession altérée d'images, on peut affirmer qu'il s'agit d'une double déformation et que là encore, le récit prime pour créer un personnage.
Finalement la dualité entre la structure de narration et le travail d'écriture proprement dit est propice à cette dernière catégorie. Comme un compromis entre écriture en terre vierge de passé et réécriture de la mémoire, ce processus s'il ballote l'auteur a le mérite de se nourrir à la fois du réel et de l'imaginaire...
B. Marshall