samedi 6 février 2016

De sang et de souffle

Extrait du journal de bord

Au sujet de l’inspiration…

On croit souvent que l’inspiration est faite d’air, voire de courant d’air, qu’elle est charriée par un souffle aux attributs divins dont celui d’entendre la muse… Si je vous disais que l’inspiration est aussi faite de sang, de tripes et de boue, et de biens d’autres choses invisibles à l’œil nu ? Vous auriez peut-être un léger mouvement de recul… Puis vous vous demanderiez comment c’est possible. Comment la transparence de l’air pourrait-elle être compatible avec la chair et la terre, toutes deux susceptibles de dégouliner sur les pages blanches ?
C’est qu’il faut être traversé pour recevoir le végétal et l’organique sous toutes leurs formes. La réceptivité est indispensable pour capter sang, sueur et autres liquides plus ou moins odorants, pour les transformer grâce à un processus alchimique en encre et en signes. Autrement dit, point de création littéraire sans une bonne dose de souffle. Cet air qui balaie les scories de la routine et des mauvais plis pour gonfler à bloc les voiles de l’imaginaire, cet air-là emmène par delà l’individu qui le reçoit, en ignorant les frontières du temps et de l’espace. Ce que l’on appelle « liberté d’expression » s’avère indispensable à ce stade, et je ne saurais suffisamment insister sur sa présence précieuse sans laquelle tout le processus se gripperait… 
(Il vous reste quinze jours pour participer au projet collectif sur MyMajorCompany « Anthologie pour la liberté d’expression »
  https://www.mymajorcompany.com/anthologie-pour-la-liberte-d-expression ! ;) ) 

Pour hisser la grand voile, pour tenter le grand voyage, il faut laisser la peur à quai…

N’allez pas croire pour autant que l’auteur se contente d’être un réceptacle passif ! C’est au moment où il est paré au décollage que le souffle vient de toute sa force mobiliser la fibre de l’écriture. Cette dernière constitue l’être profond de l’auteur et concerne parfois les générations précédentes ; quelles que soient les circonstances de l’arrivée en écriture, cette fibre se réveille et se révèle avec le souffle. De ce qu’une vie aura glané de joie, d’amour, de douleurs, de déceptions ou de passions, une partie sera donnée en pâture au monstre de papier, une partie seulement, ou pour être exacte un mélange de fragments, de sensations, de sentiments… L’inspiration se puise donc parmi cette collecte à partir d’une vie bien réelle…